Introduction
Le titre du dossier m’invite à ouvrir le propos par des considérations d’ordre général afin de présenter mon analyse des évolutions socio-politiques actuelles. Les mutations diverses à la fois géo-socio-politiques, économiques, idéologiques ont affecté plus spécifiquement notre champ du soin psychique affectent nos subjectivités et intersubjectivités. En proie à de profondes incertitudes structurelles, institutionnelles et symboliques, chacun doit construire des nouages singuliers pour faire face au désenchantement, à la perte de sens et au désarroi. Après avoir noté certains aspects de ces mutations, il s’agira de faire des hypothèses sur les nouvelles économies subjectives, tenant compte de l’accentuation sur la vacillation dépressive du sens façonnant des personnalités en état limite, en équilibre instable favorisant les extrémismes et les formes perverses.
Nouvelle territorialisation de la socialisation
Il me semble important de rappeler que l’avènement d’une civilisation technoscientifique s’est accompagné d’un recul de l’État dans de nombreux secteurs, décrit par les sociologues sous le terme de « désinstitutionnalisation ». Le démembrement des services publics et l’externalisation libérale de leurs services se sont accompagnés de la technicisation de certains acteurs¹. Cette évolution a conduit à transformer d’une manière inédite la façon dont nous appréhendons et concevons la souffrance psychique. Un nouveau langage – dont le DSM est la plus parlante illustration – a requalifié les « symptômes » en « troubles » afin de promouvoir des réponses plus opératoires de réadaptation, si bien que la réduction des symptômes prévaut sur la recherche de son sens, à partir de l’histoire personnelle du sujet. Dans nos consultations, on constate chaque jour qu’une logique pragmatique et opératoire remplace aujourd’hui la culture du sens et du récit. Au travail de symbolisation se substituent pensée opératoire et pensée magique. De…
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