Les enjeux cliniques de la précarité
La notion de précarité est passée dans le domaine des politiques publiques, mais au prix d’une limitation de sa signification.
Dans son sens le plus simple et le plus positif, être précaire signifie avoir absolument besoin de l’autre, des autres, pour vivre ; sous réserve, bien sûr, qu’il y ait un autre, des autres en position d’y répondre, dans le respect et la réciprocité. L’exemple type est celui du bébé, mais aussi du vieillard, du malade, de l’accidenté de la vie… En réalité, on peut parler pour tous les êtres humains d’une « saine » précarité, de la naissance à la mort, plus ou moins importante selon les âges et les situations.
La difficulté et la psychopathologie surgissent dès lors que l’autre, les autres ne sont pas là d’une manière suffisamment bonne pour que la vie biologique, intersubjective, sociale, se déroulent dans le respect et la réciprocité. Alors la précarité prend ce sens négatif qui la caractérise souvent dans notre vocabulaire : perte des sécurités de la vie sociale et devant l’avenir, incertitude térébrante sur les étayages sociaux de base. Et l’on peut alors décrire des syndromes et des formes cliniques qui s’appliqueront aux plus précaires : les SDF, les jeunes en errance, certains malades mentaux, les pauvres, contribuant à la définition d’un nouveau paradigme de la santé mentale pertinent et légitime.
Ce dossier cherche à s’interroger sur les facteurs de la précarité autant que ses enjeux psychiques.