Entretien avec Christopher Bollas
Entretien réalisé en anglais et traduit par J.-B. Desveaux.
Jean-Baptiste Desveaux : Votre pensée contient des aspects innovants, polémiques et même révolutionnaires par rapport à une conception classique et orthodoxe de la psychanalyse. Pouvez-vous expliquer à vos lecteurs comment vous avez cheminé vers ces innovations ?
Christopher Bollas : Comme bon nombre de psychanalystes, j’ai commencé avec Freud et je me suis retrouvé à utiliser son « autre » théorie de l’inconscient, celle qu’il utilise dans L’Interprétation des rêves et qui est fondée sur une théorie complexe de la « réception inconsciente » pour vivre les expériences (le quotidien). Puis, j’ai travaillé sur les matrices formées par les souvenirs, les désirs, les angoisses et bien d’autres choses, arrivant enfin à la forme d’un rêve qui était une image meilleure que mille mots. Freud n’a pas rendu justice à cette théorie de l’inconscient, et pour des raisons complexes selon moi, il a opté pour une autre (importante) théorie du travail inconscient : son concept de l’inconscient refoulé.
Jean-Baptiste Desveaux : Dans vos livres, vous avez soutenu que l’échec de Freud à écrire sa première théorie de l’inconscient (ce que vous nommez « l’inconscient récepteur ») au sein de sa métapsychologie fut, assez ironiquement, un acte de refoulement inconscient.
Christopher Bollas : Oui, je pense que l’inconscient récepteur est initialement le travail de l’inconscient refoulé originaire et fait donc partie de ce que je nomme « l’ordre maternel ». Mon argument a été que Freud a refoulé ce qu’il a « pris » et ce qu’il a reçu de sa mère et, malheureusement, la créativité réceptrice des processus inconscients s’est trouvée absente de sa métapsychologie ; hélas, bien de ses successeurs ne l’ont pas diffusée…