Je m’appelle Coronavirus
Éditorial

Je m’appelle Coronavirus

Je m’appelle Coronavirus. ça fait très longtemps que j’existe, mais peu me connaissaient jusqu’à présent. Il y a bien eu quelques savants visionnaires et prémonitoires, mais on ne les a pas écoutés. Depuis quelque temps, je me suis dit qu’il fallait donner une petite leçon à ces humains de plus en plus arrogants. Ils se targuent de mondialisation, de globalisation. Ils mettent en danger la vie de notre planète. Eh oui, je dis notre planète, car cette planète est aussi la mienne ! Il fallait faire quelque chose.

Je ne peux pas me déplacer. Pour aller d’un endroit à un autre, j’ai besoin d’un vecteur qui me transporte. Alors, le petit malin que je suis s’est dit que puisqu’ils ne cessent de se déplacer frénétiquement, c’est eux qui allaient me transporter. Je suis très contagieux. Il suffit qu’ils toussent, voilà les particules empoisonnées qui se propagent dans l’air, infectant leurs voisins, leurs amis, leurs collègues, leurs familles. Je n’avais pas imaginé d’ailleurs l’impact incroyable sur leurs existences. Plus de spectacles, plus de restaurants, plus de concerts rock, de cinéma, de théâtre, de musée. Oui, bien sûr, il y a eu la peste, le choléra, la grippe espagnole, qui ont fait bien plus de morts. Mais qui n’ont pas à ce point bouleversé leur mode d’organisation sociale, sur toute la planète et de manière durable.

Voilà donc que le plus petit, le plus insignifiant organisme met à terre l’espèce humaine qui se croit supérieure. Ce qui m’amuse beaucoup, c’est la célébrité que je suis devenu si rapidement. C’est vrai : qui peut se vanter d’être devenu une vedette planétaire en si peu de temps ? Je ne m’en vante pas d’ailleurs, car je n’ai pas un tempérament narcissique, contrairement à d’autres, les innombrables spécialistes, hommes d’état, experts en tous genres, qui s’expriment toute la journée dans les médias, pour dire une chose et son contraire, pour avouer en fin de compte qu’ils ne savent rien.

Avec le vaccin, ils pourront se prémunir contre moi, le Coronavirus. Mais mes congénères prendront le relais. Vous, les humains, il faudra bien vous rendre compte que vous n’êtes qu’une partie du monde des vivants.

Simone Korff-Sausse