Clinicien infatigable de l’adolescence et enseignant-chercheur passionné de psychopathologie, François Marty a traversé, depuis ses études en 1968 jusqu’à son éméritat, toute une période de développement et de remises en question successives des grands courants psychanalytiques post-freudiens et lacaniens. Dans L'Anamorphose adolescente, il mène avec Julie Cohen-Salmon un entretien riche en détail à la fois sur son travail et sur les circonstances qui l’ont amené à rejoindre l’équipe des pionniers de la conceptualisation du processus adolescent tels Annie Birraux, Philippe Gutton et Raymond Cahn parmi tant d’autres figures qu’il nomme.
Mais qu’entend François Marty par le terme « d’anamorphose adolescente » ? Il s’agit d’une référence à « l’os de seiche » sur le tableau des Ambassadeurs de Holbein, appelé ainsi avant que l’historien d’art Baltusaïtis ne découvre qu’il s’agissait de l’anamorphose sophistiquée d’une tête de mort, d’une vanité, allégorie de la fatuité des possessions humaines. Cette représentation qui oscille entre énigme et révélation ne pouvait qu’intéresser les psychanalystes. Lacan (1954) en a fait l’un des grands thèmes de son onzième séminaire, indiquant que le peintre donnait ainsi à voir le sujet néantisé, l’incarnation imagée du « moins phi » de la castration. Pour François Marty, c’est le réel de la sexualité adulte qui se trouve ainsi dévoilé à l’adolescent. Sa métaphore se construit en deux temps. L’enfant est d’abord face à la sexualité tel le visiteur ramené à sa petitesse face à la toile exposée à la National Gallery de Londres, écrasé par le faste de ce tableau en pied. La sexualité adulte, telle « l’os de seiche », reste énigmatique pour lui, il n’y comprend rien, il se forge des théories qui ne tiennent pas la route. Puis il tourne les talons et part sur un autre chemin. Lorsqu’il se retourne plus tard vers ce tableau, l’enfant devenu…
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