L’inconscient à fleur de peau

L’inconscient à fleur de peau

Claude Bénazéraf

Editions Gradiva, 2015

Bloc-notes

L’inconscient à fleur de peau

Après Les chagrins de la peau : la peau miroir de l’âme, paru aux éditions Grasset en 1994, le Dr. Bénazéraf publie L’inconscient à fleur de peau. Entre ces deux ouvrages une différence de taille puisque ce dermatologue homéopathe psychosomaticien et diplômé de médecine chinoise à la faculté de Bobigny a vu sa vie transformée par un accident vasculaire cérébral qui lui a ôté la parole et lui interdit d’exercer. Néanmoins sa réflexion et son intérêt pour son métier et ses patients ne se démentent pas comme on peut l’observer à la lecture de cet ouvrage, publié avec l’aide de son épouse. « Ce que l’on observe, ce que l’on voit sur une peau qui s’offre à notre regard est un effet, mais ce que nous entendons dans le langage de cette même peau, c’est une histoire, c’est l’histoire du sujet tissée de souvenirs, d’événements, stressants et parfois de souffrances. Et l’organe peau est là pour nous montrer tout cela. »

Convoquant écrivains, J.M.G Le Clézio, Paul Valéry, Balzac et psychanalystes dont Didier Anzieu, l’auteur met en relation certaines maladies de peau invalidantes illustrées par des cas cliniques de patients, comme l’eczéma ou le psoriasis, avec des souffrances psychiques inconscientes de la petite enfance. Il nous expose sa façon de travailler avec des médicaments mais aussi avec la parole. Exemple : le psoriasis. S’il est courant de dire que la maladie survient après un choc affectif, ce que remarque le Dr. Bénazéraf, c’est que ce choc affectif qui a entraîné le psoriasis n’est pas le premier subi par le patient. Le premier en effet, survenu dans l’enfance, est passé inaperçu. Il n’a pas pu être « mentalisé », peut-être parce qu’il était trop violent, trop insupportable. Ce choc, souvent lié à l’abandon, a provoqué une fragilité. Un second choc du même ordre, à un moment où le patient est capable de le vivre et de le supporter émotionellement, renvoie au premier et déclenche la maladie. « La mise à jour du premier traumatisme sera d’une grande utilité, selon l’auteur, pour une meilleure compréhension de la maladie. » Pour l’urticaire : « On a l’impression chez ces patients qu’à la place de la parole s’est mise en place de l’agressivité. Pour dire son mécontentement, le malade choisit cette manifestation de la peau. Il retourne son agressivité contre lui-même et montre à l’autre son mécontentement par ce signal. ». Cette agressivité peut renvoyer à une situation de conflit aigu mais latent vécu dans la petite enfance.

Lorsque la problématique de l’abandon est plus archaïque, c’est la dermatite atopique qui s’installe « la peau lésée permet à l’enfant de maintenir de façon symbolique son lien disparu avec sa mère ». Différents cas cliniques, puisés dans la pratique de l’auteur viennent illustrer ces observations « Le rôle du médecin psycho-somaticien en dermatologie est de s’intéresser à la maladie pour en décrire les symptômes, s’efforcer d’en comprendre les mécanismes et les causes immédiates pour la faire disparaître avec l’aide éventuelle de traitements médicamenteux. Son rôle est aussi d’écouter le discours du patient pour situer la maladie dans une histoire et un environnement, mieux comprendre les raisons de son apparition et son sens caché »