Lorsque je commence un stage de théâtre, je demande à chaque panicipant de se présenter en silence, dans un geste. Parfois l’attente est longue, chargée d’inquiétude mais le travail ne commencera pas sans ce gestc. Signe de la personne, de sa présence à nous, au monde, dans cer instant. Aucun geste ne se ressemble. Il a toujours quelque chose d’unique. JI en est qu’on n’oublie pas. Cette jeune femme, longue à se décider qui finalement s’élève, monte les ma1l1S tremblantes, à peine jointes, les ouvre et les ferme, puis demeure suspendue, énigmatique et sensible, intérionsée, présente. Intégré dans un jeu, dans un personnage, ce geste sera la marque de celui qui l’a inventé, parfois à son corps défendant.
Je rencontre des classes-théâtre terminales dans une petite salle de répétitions. Une quinzaine de garçons et de fil!es. Ils ont préparé des textes du Dom Juan de Molière. Le trac précipite les mots, banalise la présence, scolarise le texte. Il faut que ceux qui ne jouent pas agissent comme un choeur, soutiennent cette démarche lente, ce temps du corps qui cherche. Il ne faut dire les mots que nés du silence. Bab, qui a l’humour et la fausse balourdise de Calder jeune, ne se précipite pas pour parler, il nous regarde, fait tomber son livre, cherche les mots français. Ainsi, i! rejoint le 5ganarelle de Molière qUlIUl aussi se perd dans Je labyrinthe des mots. Olivier, menu et myope, va sur la pointe des pieds voir si son maître n’est pas derrière les rideaux, à la cour, au jardin. Il n’ose pas décrire à Bob ce monstre de Dom Juan dont il est le serviteur. Ce silence entre eux fait vivre l’espace qui devient théâtre, lieu des ombres, des revenants, des spectres. Et le public, qui est lui-même attente, naît.