Survivre est le titre de la dernière parution de la Petite bibliothèque de psychanalyse aux Puf qui nous propose une réflexion passionnante où psychanalystes et anthro-pologues débattent des enjeux de la survie, dans un monde où la culture se heurte aux échecs répétés du processus civilisateur. Depuis la Shoah, qui place la survie comme situation ordinaire et générale de l’espèce humaine, faisant de l’Holocauste un fait de culture (Françoise Coblence), jusqu’au drame des migrants et des réfugiés demandeurs d’asile, en passant par les génocides qui témoignent de la destructivité de l’homme. La survie serait-elle plus près des instincts que des pulsions ? Rien n’est moins sûr, tant l’instinct de survie de l’homme est dénaturé par lui, à l’image de sa capacité, unique parmi toutes les espèces, à s’autodétruire et à détruire son environnement. C’est alors plutôt le malaise dans la nature qui menace la culture d’effondrement. Quelle survie en effet devant une telle inaptitude de l’homme à l’auto-conservation, demande Jacques André ?
La survie paraît s’opposer à la mort, et pourtant elle y est intrinsèquement liée, tant elle en partagerait les mêmes logiques. Elle se paye au prix d’un affrontement et d’une confrontation perpétuelle à la mort dans une tension illimitée, un bras de fer jamais gagné, jamais perdu. Cette tension place celui qui sur-vit sur un fil dangereusement tendu au-dessus du vide, entre pulsion de vie et pulsion de mort, où c’est parfois de faire le mort qui permet d’échapper à la mort. Absent du vocabulaire freudien, le terme de « survie » n’est pas un concept psychanalytique. Par contre, on trouve dans l’œuvre de Winnicott la notion très importante de la survivance, celle de l’objet primaire aux pulsions destructrices du nourrisson. Ce concept a connu de larges développements par la suite :…