A-t-on quelque chose à dire sur la loi de PMA actuellement en discussion ?
Éditorial

A-t-on quelque chose à dire sur la loi de PMA actuellement en discussion ?

Un assourdissant silence semble régner parmi les pédopsychiatres devant cette loi en cours de discussion à l’Assemblée Nationale. N’avons-nous rien à dire concernant les propositions contenues dans le projet de loi de PMA ? Craignons-nous d’apparaître comme passéistes et de défendre des principes surannés ? A moins que plus sagement nous fassions preuve d’humilité après avoir trop souvent occuper l’espace médiatique pour un oui ou pour un non ! Il est vrai que la crainte d’être assimilé aux tenants de la « manif pour tous » ou à un thuriféraire agitant l’encensoir de « l’intérêt de l’enfant » pour mieux refuser toute évolution sociétale est de nature à décourager plus d’un d’entre nous ! Pourtant cette loi touche le cœur même des questions de filiation, de structuration de la famille, de parentalité, des rapports hommes/femmes et in fine de conception de l’autorité parentale… Un des ressorts de cette proposition de loi est d’apporter de la clarté, disons plutôt de la transparence sur la question de la filiation en levant le secret de la conception par PMA pour les couples stériles. Précisons d’abord qu’aucun enfant, dès le plus jeune âge, ne confond les parents qui s’occupent de lui et l’élèvent avec le géniteur, celui ou celle qui a donné ses gamètes… Reconnaissons aussi que ces enfants nés de PMA souhaitent connaître… qui ? La personne qui a donné son ovule ou ses spermatozoïdes ? Le nom du donneur et ses origines ? Le profil génétique de ce dernier (soit pour éviter le risque fantasmé d’une consanguinité soit pour mieux identifier un risque génétique) ? Pour rappel, le mariage servait ce que d’aucun nomme une fiction : tous les enfants sortant du ventre d’une épouse auront pour père le mari de celle-ci… Les mauvaises langues disent qu’en cas de recherche génétique il y a bien des surprises. La filiation a toujours été opaque restant dans le secret des alcôves… Si l’opacité est source de souffrances, la transparence est-elle le remède miracle ? Parlant du « fantasme des origines » je me suis entendu dire par une sociologue très impliquée dans ce projet de loi : « mais de quoi parlez-vous ? ». On pourrait continuer avec la question de l’autorité parentale et bien évidemment de la place de la fonction paternelle dans la mesure où est légalisé, reconnu par l’état donc, le recourt à la PMA pour une femme seule… Certes, jadis une femme pouvait tout à fait se faire faire un enfant par un homme de passage ! Où est le changement, me rétorque-t-on ! J’admets. Mais il est urgent dans ces conditions que notre discipline refonde complètement ses conceptions sur l’autorité et cesse de répéter ad libitum une antienne apprise au milieu du siècle précédent sur les bans des universités ! Assourdissant silence vous dis-je…

Daniel Marcelli
Professeur émérite de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent