Dans l’histoire des soins psychiques, la notion de présence a été davantage conceptualisée par les philosophes, les phénoménologues et les psychiatres phénoménologiques¹, elle n’a jamais été élevée au rang d’un concept psychanalytique. Comme l’indique René Roussillon (2012, p. 49) : « la métapsychologie de la présence et, son corollaire indispensable, la question des formes de la symbolisation en présence de l’objet » est l’un des parents pauvres de la métapsychologie psychanalytique.
Freud a joué avec la présence en choisissant de se soustraire au regard de ses patients dans le dispositif de la cure type divan-fauteuil. Se soustraire pour mieux entendre et se soustraire pour être mieux entendu ? Se dérober pour être plus présent encore ? Pour laisser toute la place aux sens et à la présence sensuelle des corps en présence ? Étonnant procédé à une époque où la figure du médecin incarnait le plus souvent celle d’un maître sachant, doté d’une autorité (une présence naturelle), convaincu de son pouvoir de guérison et campé sur les rives de la suggestion. Avec le dispositif singulier du divan, l’inventeur de la cure psychanalytique a laissé place à la parole subjectivante de l’analysant. En allégeant le poids des regards et en éloignant le face-à-face, Freud a libéré un espace pour écouter autrement les manifestations de l’inconscient. Une place est laissée pour que s’y asseye et s’y déploie les fantasmes et les mouvements transféro-contre-transférentiels. Cela étant, la présence de Freud ne s’en faisait pas moins sentir pour autant si l’on en croit les paroles de ses analysants, plus encore lorsque le cigare se consumait.
Depuis Freud, les psychanalystes se sont largement intéressés aux modalités négatives du fonctionnement psychique – de l’absence (Pierre Fédida, 1978) au négatif (André Green, 1993). Mais pour penser la clinique actuelle,…