Le 5 février dernier, Donald Trump a de nouveau sidéré l’espace médiatique et diplomatique international avec sa stratégie du flooding-the-zone en annonçant, au milieu de dizaines de déclarations et de décrets insensés, vouloir faire de Gaza la Riviera du Moyen-Orient et « déplacer » quelques millions de Gazaouis vers la Jordanie et l’Égypte. Comment ne pas songer aux mots de détresse écrits par Sigmund Freud (1915, p. 9), alors en pleine tourmente de la Grande Guerre : « Pris dans le tourbillon de ces années de guerre, informés unilatéralement, sans recul par rapport aux grands changements qui se sont déjà accomplis ou sont en voie de s’accomplir, sans avoir vent de l’avenir qui prend forme, nous-mêmes ne savons plus quel sens donner aux impressions qui nous assaillent et quelle valeur accorder aux jugements que nous formons » ?
Les auteurs réunis dans ce numéro par Fanny Dargent et Mickaël Benyamin s’intéressent au vacillement et au vertige (du Moi, de l’amour) à une époque où nos patients témoignent d’un brouillage douloureux des repères hérités de l’« ancien monde » – celui de leur enfance ? – qui semblent se périmer de plus en plus vite et éroder leur sentiment continu, et suffisamment pérenne, d’existence. Si les psys n’ont ni la vocation ni les moyens de contenir le grand Vacillement du monde, n’ont-ils pas l’exigence éthique d’explorer plus attentivement que jamais les mondes psychiques de leurs patients et, penchés sur leurs carnets entre deux séances, suivre l’adresse d’un transfert singulier au milieu des désespoirs de l’ère du temps ? Écrire, lire, débattre et penser dans un équilibre général vacillant et une anxiété galopante n’est-ce pas déjà offrir une petite chance au travail d’après-coup mis en péril par l’emballement de la temporalité postmoderne ?
Le directeur de la publication m’a…
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