Introduction
L’usage du terme carrefour, souvent utilisé pour définir la clinique psychomotrice, est peut-être lié à la singularité de son fondateur, Julian de Ajuriaguerra ; il était neurologue de formation, psychanalyste et inspiré par la phénoménologie de Maurice Merleau-Ponty qu’il cite à plusieurs reprises dans ses écrits. Nous pouvons faire l’hypothèse que les deux ouvrages de Merleau-Ponty, La Structure du comportement paru en 1942 et La Phénoménologie de la perception paru en 1945, ont exercé une influence sur la pensée d’Ajuriaguerra. À ces références, nous pouvons ajouter la psychologie génétique, notamment celle d’Henri Wallon dont il dit, lors de sa nomination au collège de France à la Chaire de Neuropsychologie du développement, qu’il n’a « jamais été le disciple mais que j’ai toujours considéré comme mon maître » (Ajuriaguerra, 1976).
Ce qui apparaît essentiel dans sa démarche, ce n’est pas tant cette grande ouverture d’esprit que sa capacité à tenir ces différentes approches sans les opposer ni donner à l’une d’entre elles une place prépondérante ; on raconte qu’il parlait de neurologie aux psychanalystes et d’art aux neurologues. Ajuriaguerra ne pouvait imaginer l’homme autrement que dans sa multi-dimensionnalité et celle-ci ne pouvait être comprise que dans ces différentes approches. Nous pouvons dire que l’œuvre d’Ajuriaguerra dépasse les clivages qui existent entre les différentes disciplines pour aller vers des pensées partagées, non réductibles les unes aux autres : « Son activité pluridisciplinaire scientifique, complétée par une formation culturelle vaste et variée alliant connaissance des idées philosophiques, politiques, religieuses et connaissance de l’histoire, de l’art, de la littérature ainsi que de la poésie de nombreux peuples, tout cela fait de lui un de ces savants universels. » (Oar, Ugartechea, 1994, p. 2)
Or il faut bien constater qu’une telle…