QUESTIONS PRÉLIMINAIRES
Dans les années 1990 a été décrit au Japon chez des jeunes hommes des conduites de retrait sévère de plus de 6 mois et pouvant durer des années, réalisant un véritable effacement social, scolaire et professionnel. Ce phénomène a suscité un très grand intérêt dans le grand public et les milieux médicaux, aboutissant dans les années 2000 à la publication par le ministère japonais de la santé, d’un livre blanc. Le phénomène a continué à prendre de l’ampleur au Japon où l’on considère que plus de 500 000 sujets sont reclus volontairement. Devant la description de cas de Hikikomori dans de nombreux pays y compris au-delà du continent asiatique, certains auteurs n’hésitent pas à décrire le phénomène comme une pandémie mondiale (Kato, 2011).
De nombreuses questions ont surgi à la suite des premières descriptions puis de leur extension. Au-delà des enjeux de délimitation du Hikikomori, sa nature génère de vifs débats, car elle mêle problématiques individuelle, familiale et sociétale, tout comme les enjeux intrapsychiques mobilisés. Nous tenterons à partir de quelques fragments cliniques de dessiner les deux grandes formes de Hikikomori que l’opposition Hikikomori primaire et secondaire ne recouvre pas entièrement.
LE HIKIKOMORI UN PHÉNOMÈNE AUX FRONTIÈRES
Les questions suscitées par le phénomène de Hikikomori le placent aux frontières de la nosographie classique, du normal et du pathologique, du culturel et de l’universel, de l’individuel et du groupal. La métaphore géographique du terme de frontière s’impose à la fois dans sa valence de délimitation et dans celle de débat, de confrontation, entre enjeux et travail de frontière à l’adolescence (De Luca, 2019) et rend compte de la part processuelle du Hikikomori à…
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