Le pouvoir des psy
Éditorial

Le pouvoir des psy

Ariane se révolte : lors de son divorce le juge a confié la garde de son fils au père. Brigitte aussi : on ne veut pas que sa fille « saute de classe »; Louis encore : on ne veut pas l’embaucher. Qui sont Ariane et son fils, Brigitte et sa fille, Louis? Nous ne le saurons jamais, mais peu importe : Mme Remy, dans un « dossier » récent de L’Express, nous affirme qu’ils ont bien raison et qu’il y a scandale : tout est de la faute des psy, qui « ne servent que l’intérêt des institutions ou de la morale », « qui se mêlent de tout », et même, après « quelques questions ridicules », « donnent leur avis », « jusqu’à l’abus » : « Big Brother », conclut-elle. Elle cite d’ailleurs ce qu’il faut de témoignages de psy qui avouent : « nos avis sont pourris de transferts et de contre-transferts, on peut être fou et psychologue »dit une professionnelle »(?).

Dans quelques années, si se poursuit cette vigoureuse action, la « psy » sera enfin éradiquée. Il deviendra urgent de dénoncer un nouveau scandale : quelle irresponsabilité, quelle inhumanité! comment peut-on laisser un enfant dans une classe où il ne peut rien faire, un autre à la garde d’une mère psychotique, un psychopathe veiller à la sécurité d’une entreprise? etc. On réclamera avec force la création d’un corps de…comment les appellera-t-on? des gens qui sauront écouter, comprendre, conseiller, soigner peut-être. L’Express publiera un nouveau dossier, dont les responsables seront considérés comme de bons journalistes. Bons, vous voulez dire intellectuellement honnêtes? mais non voyons : bons parce qu’ils font vendre. Il y a de mauvais psy? Certes, comme il y a de mauvais journalistes.