Freud écrit dans Malaise : « Rien dans la vie psychique ne peut disparaître, (...) tout est conservé d’une façon quelconque et peut reparaître dans certaines circonstances, par exemple au cours d’une régression suffisante2 ». Mais qu’est-ce qu’une régression suffisante ? Si « les états primitifs peuvent toujours être réinstaurés », à quelles conditions le mouvement régressif dans la cure s’enclenche-t-il, et dans quelles conditions la régression devient-elle productive ? En quoi peut-elle être thérapeutique ?
En vérité, la régression n’a pas bonne presse. Associée au « recul en arrière » (« mon patient régresse », dit tristement tel analyste), elle est souvent chargée d’une connotation négative (parfois hâtivement associée à l’action de la pulsion de mort). Et, lorsque sa valeur structurellement progrédiente est soulignée, c’est très souvent sous le signe d’une prime à la résistance. Il n’est que de voir la position si ambivalente de Freud à l’égard du « phénomène fonctionnel » de Silberer. Dans Pour introduire le narcissisme, il y voit un additif incontestable à la doctrine du rêve, avec la découverte que l’auto-observation du rêveur participe à la formation onirique. Mais il ne ménage pas sa critique dans le Complément métapsychologique, où il écrit : chaque rêve serait susceptible de deux interprétations, celle dite psychanalytique, et celle dite anagogique - cette dernière faisant abstraction des désirs et visant la représentation des fonctions psychiques supérieures grâce à la langue symbolique. Le prix chèrement payé par les tenants de cette régression positive est donc celui de la désexualisation.
Pourtant, il n’est que de lire Bertram Lewin et le « bon usage » que fait Descartes de la régression dans ses rêves3, pour saisir comment projeter ses sensations douloureuses hors de lui, séparer en rêve la droite et la gauche au milieu du grand vent et d’un melon, y discerner le…