La mode des dictionnaires, abécédaires et miscellanées divers, court toujours qui n’impose apparemment pas d’ordre préconçu et permet au lecteur contemporain, velléitaire de sa propre singularité autant que fatigué d’être lecteur, le parcourt qu’il daignera s’autoriser de lui-même. Ici le sujet est gros, c’est celui de l’anorexie, et l’auteur est épais, c’est Maurice Corcos, Professeur de pédopsychiatrie, psychanalyste et spécialiste reconnu de la question qu’il sait envisager selon des ramifications originales, dégagées des contingences médicales lesquelles sont nécessaires mais, naturellement, non suffisantes.
Le prétexte, sans doute, lui appartient. Il emprunte ce chemin d’un dialogue avec Pierre Fédida qu’on constatera ininterrompu pour venir poser le cas de Melle A.. A comme Adolescence, Anorexie, Antigone… sur fond d’absence, la lettre paradigme du privatif tel le O d’Anna, cette ronde pleine autour du vide, le fut pour l’hystérie. Mais là réside, davantage en corps, le vide en ses mirages, un « vide défensif sécrété par le sujet qui risque de finir par l’étouffer » avec deux écueils que l’auteur évite très résolument: la conceptualisation de la carence seule et la fascination que le geste d’un manifeste désir au-delà du besoin pourrait susciter. Pas de ce genre de publicité dans cet abécédaire au vocabulaire efficace qui jamais ne bascule dans le simplisme. Non, plutôt une exigence, constante, celle de témoigner de la complexité de l’esprit, même lorsqu’il se dresse et s’englue dans la conduite fétichisée, forcenée et qu’il voudrait nous faire passer la contrainte pour l’expression d’une ultime liberté (voir l’entrée « Pro-ana » par exemple). Jeu de dupe où il importe de ne pas se laisser aller pour relever le vrai défi lancé sous la table par Melle A., le seul, tracé sur l’ensemble du volume : qu’elle se trouve effectivement et affectivement reconnue dans ses appétits, ses fureurs,…