Dans ce travail passionnant sur la clinique de l’adoption, Georgeta Le Ray-Mitrea annonce d’emblée la couleur : « L’adoption a la capacité de mettre à nu ce qui reste à l’ombre de la filiation classique ». La zone d’ombre la plus centrale recouvre le rapport à l’inconnu, à l’origine, à l’étranger.
Cet ouvrage nous plonge au cœur de la scène originaire de l’adoption, où l’enfant adopté doit aussi être conçu par ses parents, dans leur fantasme comme dans le sien. La tâche est d’envergure, puisqu’il s’agit de remplacer la naissance biologique par une naissance fantasmée. Georgeta Le Ray-Mitrea propose une exploration poussée des conflits psychiques propres à l’adoption, toujours illustrée par de nombreux cas cliniques, qui dévoilent des motivations inconscientes à l’adoption très diverses. Si nombre de ces conflits font partie de la vie psychique de tout un chacun, le moins qu’on puisse dire c’est que l’adoption se présente comme une complication supplémentaire, amenant à la conscience et dans la réalité ce qui reste d’ordinaire refoulé. La première difficulté concerne le fait d’avoir deux mères… Or la mère « biologique » est tout autant un fantasme qu’une certitude pour la mère adoptive comme pour l’enfant. On peut dire que pour l’enfant adopté, mater non certissima est, tant il doit composer avec ces mères réelles et leur doubles fantasmatiques.
Le fait que chaque femme qui a gravité autour de l’enfant soit susceptible d’incarner la mère d’origine montre la force du lien psychique, la prévalence de la réalité psychique et de la filiation adoptive. Et ceci même dans la filiation classique, comme en témoigne le bien connu fantasme d’abandon et d’adoption dans le roman familial. Ces problématiques révèlent les conflits entre la force du lien psychique et l’indiscutable lien biologique comme…
Déjà abonné ?
Les abonnements Carnet Psy
