Assise dans la salle d’attente, la mère a entendu des bruits diffus derrière la porte du bureau où se tient le psychodrame et d’où sort son fils. Pendant qu’elle lui remet son manteau, elle lui demande : « Qu’est-ce que vous fabriquez, là-dedans ? ». L’enfant répond : « On fait des bêtes, et des gens ».
L’enfant avait donc eu à faire à des bêtes et à des gens. À moins qu’il ne se soit senti pouvoir être aussi bien « bête » que « gens » à la grâce du jeu. Il avait voyagé un moment dans ses perceptions et dans ses sensations. Cherchant à apporter du nouveau en créant du mouvement dans les représentations des patients, le psychodrame est un groupe provocateur de figurations. Il est une réunion, une conjugaison, une combinatoire d’appareils psychiques qui s’incarnent en corps et en parole. Ce travail choral mime, en le fictionnalisant, ou encore hypothétise, ce qui se passe dans l’appareil psychique d’un patient et dans la manière dont un sujet se lie à ses objets.
À sa manière, le psychodrame est grégaire. Il affirme le caractère indispensable des apports de l’objet et du groupe dans la fabrique subjective. Ce groupe est un premier contenant parmi les enveloppes psychiques dont le psychodrame sait être la prothèse, lorsque celles-ci sont manquantes pour les patients que nous y recevons. Pour ceux-ci, peut-être plus encore que pour d’autres, « il faut un village pour élever un enfant ». Le groupe du psychodrame institutionalise d’entrée le patient et le fait bénéficier des enveloppes symbolisantes du groupe. La contenance groupale et symbolisante du psychodrame constitue un bon exemple de notre capacité à faire encore institution dans des formes spontanées qui sont des bastions contre ces temps rudes de désinstutionalisation.
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