"Dansez, dansez, sinon nous sommes perdus !"
Pina Bausch, 2008
La maison d’accueil spécialisée La Pommeraie est liée à un hôpital psychiatrique qui y oriente des patients dits « déficitaires », souvent porteurs d’un héritage asilaire. C’est au cours des années soixante que les premiers accueillis, alors enfants, ont été hospitalisés pour des psychoses graves ou des troubles autistiques encore mal diagnostiqués à cette époque. Aujourd’hui dans la force de l’âge, la spécificité de leur accompagnement quotidien s'appuie sur la contenance de leurs manifestations d’angoisses archaïques liées à des états de souffrances primitives et à une problématique d’enveloppe défaillante (Mellier, 2018).
Être psychologue clinicienne en maison d’accueil spécialisée requiert une créativité pour s’adresser au sujet porteur d’une pathologie de type archaïque. En marge du « monde parlant », le corps passe au premier plan de la rencontre, parfois sidérante, qui ne peut s’élaborer dans un registre de type secondaire (Aulagnier, 1975). Dans cette clinique de l’extrême, l’attention portée au mouvement s’avère essentielle pour s’engager dans le lien intersubjectif. Parce que ces moments sensoriels de co-création, souvent poétiques, génèrent une expérience esthétique, Simone Korff-Sausse (2012, 2021) propose la notion d’« empathie esthétisante ». Dans ce récit, il sera bien question de l’esthétique de l’étrangeté et de l’empathie qu’elle suscite.
En fin d’année 2021, la vie quotidienne de la maison d’accueil spécialisée se trouvait encore dévitalisée par la crise sanitaire. À cette période, la direction régionale des affaires culturelles proposait un dispositif de financement de résidence d’artistes en institution. Avec le souhait d’ouvrir nos portes encore fermées, nous avons imaginé que des artistes pourraient porter un autre regard sur les accueillis, et médiatiser leur rencontre avec un monde dont ils restent exclus. Notre choix du médium s’est attaché…
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