À l'occasion de la parution de son ouvrage Où va la France de Macron ? Dynamique du capital et luttes sociales de France, David Muhlmann tente de décrire les métamorphoses de la société et de préciser la notion de néolibéralisme.
Carnet Psy : Vous êtes sociologue et psychanalyste. Pourriez-vous nous dire, avec votre double regard de sociologue et de psychanalyste, comment vous décririez la crise multiforme que nous traversons aujourd'hui en France et qui affecte le lien social et les institutions ?
C’est en sociologue que je vous répondrai. Depuis les deux ouvrages fondamentaux de Marx Les Luttes de classes en France (1848-1850) et Le 18 Brumaire de Louis Bonaparte (1851), aucune actualisation sur une base solidement établie, qualitative et quantitative, n’a été faite, à partir d’une analyse de fond des structures profondes de la société française et de sa dynamique. On en est réduit à des écrits polémiques de style journalistique « pour » ou « contre » Macron, des spéculations sur son style de leadership ou sa psychologie supposée, ou alors des analyses étroitement institutionnelles des transformations internes à l’appareil d’État. Or c’est une analyse du « pouvoir capitaliste » dans toute son ampleur qu’il fallait entreprendre. J’ai longtemps attendu ce livre, alors je l’ai fait. Il montre a minima trois choses.
Premièrement, le phénomène Macron s’inscrit et reflète un moment de santé outrageux des pans dominants du capitalisme français financiarisé et bien inséré dans la mondialisation, qui en fait a commencé au moment charnière représenté par Sarkozy. On voit bien l’évolution du style présidentiel, d’une période gaullienne avec pour ambition le développement de l’économie nationale et de fleurons nationaux, à un chef de l’État qui, dans la division internationale du capital, impulse une économie française…