Marie Allione est bien connue des professionnels de la pédopsychiatrie pour son travail acharné et continu à l’hôpital de jour de « La rose verte ». Un film et de nombreux articles sont venus en leur temps témoigner de la remarquable synthèse qu’elle avait su y réaliser avec toute son équipe au service d’enfants présentant des troubles psychopathologiques archaïques, ceux que l’on appelle désormais, pour en réduire artificiellement la complexité, les troubles du spectre autistique (TSA). Je ne doute pas que lorsque vous aurez lu le livre qu’elle vient de faire paraître, vous ressentiez qu’il s’agit là d’une synthèse réussie de deux mouvements tectoniques contradictoires : d’une part, les raisons de construire, encore et toujours, une pédopsychiatrie humaniste, et d’autre part, la déréliction rapide de cette pédopsychiatrie humaniste sous les influences conjuguées de forces mortifères puissantes et déterminées. Les premières fondant l’espoir d’une pédopsychiatrie humaniste, sont exposées avec une délicatesse infinie lors d’un récit autobiographique humble et authentique, mâtiné de propos critiques et d’une lucidité parfois acerbe, faisant la part belle à une trajectoire vitale composée de rencontres ordinaires et extraordinaires, d’échecs inévitables et d’hésitations fécondes. La seconde, une psychiatrie déboussolée, est progressivement montrée et démontrée, et exemples à l’appui, vient rendre visible ce que les pouvoirs destructeurs en place tentent de laisser dans une ombre de mauvais aloi, loin d’un processus démocratique actualisé.
Après une enfance et une adolescence comportant quelques moments rebelles que je vous laisse découvrir, et qui peuvent aider à comprendre le choix de la pédopsychiatrie qu’ont fait un grand nombre d’entre nous, de nombreuses rencontres vont avoir lieu pour Marie Allione, parmi lesquelles je retiens deux principales, celle avec Henri Collomb et celle de Claude Allione. Le premier, fondateur d’un service de psychiatrie à Dakar, est nommé tardivement sur…