À l’heure où les motifs de consultation pour des problématiques en lien avec le travail ne font que croître, des conflits d’interprétation existent entre praticiens, sur l’étiologie de la dépression, qui peut s’inscrire dans des formes d’« épuisement professionnel » improprement généralisées sous le terme de « burn-out » . La plupart des dépressions liées au travail se caractérisent par l’intensité des sentiments d’infériorité et de culpabilité, de ne plus être à la hauteur, d’être « dépassé », par un vécu d’inaptitude et d’indignité qui sont un témoin de l’impasse psychique dans laquelle se trouve le sujet.
S’il est évident que le phénomène d’intensification du travail touche l’ensemble des catégories socio-professionnelles et s’est d’ailleurs accentué depuis la crise sanitaire du Covid avec l’extension du télétravail, ce n’est pourtant pas seulement la dimension quantitative, en termes de surcharge, qui est au rendez-vous des expériences des patients. Parmi les motifs de la plainte adressée au clinicien, il est aussi et surtout question de plaisir perdu dans le rapport au travail. Cependant, le plaisir au travail est loin d’être une production spontanée de la rencontre avec la situation de travail. Les recherches en psychopathologie et psychodynamique du travail menées depuis plus de 30 ans ont en effet montré que le plaisir est toujours second par rapport à la souffrance dans l’expérience du travail (Dejours, 1980, 2021). L’expérience du travail se présente comme une épreuve psychique majeure, décrite comme souffrance, du fait des éprouvés affectifs qu’elle suscite. La souffrance peut ainsi connaître des destins différenciés, relatifs à ses modalités de subversion et de transformation. En raison de son caractère non spontané, le repérage du plaisir au travail et/ou de ses traces dans le cadre du travail clinique peut s’avérer problématique, dans la mesure où, par son absence, il serait caractéristique d’une…
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