Compte tenu des progrès du diagnostic prénatal, un certain nombre de grossesses se voient désormais interrompues pour des raisons médicales tenant à la santé physique du fœtus et du futur bébé. L’interruption de la grossesse confronte les parents, et notamment la mère, à la nécessité de devoir désinvestir psychiquement le fœtus, ainsi que toutes les attentes dont il était porteur, et cette dynamique de désinvestissement ne va pas sans poser de difficiles problèmes théoriques et cliniques.
Il va de soi que les réflexions qui suivent peuvent également, en partie tout au moins, s’appliquer aux interruptions spontanées de grossesse, mais, dans ces lignes, nous aurons principalement en vue les interruptions médicales de grossesse, à la lumière de notre expérience à la maternité de l’hôpital Saint-Vincent de Paul (service du Pr M. Tournaire).
Pour dire les choses schématiquement, il nous semble que si, cliniquement, le fœtus paraît pouvoir être rapidement désinvesti en cas d’annonce d’une anomalie grave, il n’en demeure pas moins que ce deuil du fœtus fonctionne cependant comme un deuil à haut risque, et notamment mélancolique, dans l’immédiat ou à plus long terme, et que ceci pourrait sembler paradoxal si l’on ne se réfère pas aux travaux de S. Freud sur l’identification mélancolique. Après avoir rappelé le paradoxe freudien de l’objet mélancoliforme, nous envisagerons le fœtus en tant qu’objet d’un tel type, avant de conclure sur le deuil du fœtus et sur son risque psychopathologique.
Le paradoxe de l’objet mélancoliforme
Dans son travail sur « Deuil et mélancolie », S. Freud révèle un paradoxe apparent de l’objet de la mélancolie qui est à la fois fortement investi, mais dont l’investissement peut facilement être repris par…