Alors que tous s’accordent à dire que la psychiatrie rend service dans de nombreuses situations (catastrophe, urgences, périnatalité, adolescence, prisons, institutions.), la réalité de nos moyens est en singulière contradiction avec ces demandes en constante augmentation, et risque de se faire au détriment des patients chroniques.
Notre ministre délégué à la santé vient de satisfaire les revendications syndicales sur la réduction du temps de travail, en acceptant la création de 2000 postes de médecins pour les hôpitaux publics français. Et pourtant il sait que dans notre discipline, les postes créés ne seront pas occupés : 600 postes sont déjà vacants, et de plus, « l’évolution de la démographie médicale laisse prévoir une diminution de 13254 à 7856 du nombre des psychiatres d’ici à 2020 ».
La durée de la formation d’un psychiatre est de quinze ans environ, et le problème posé par le départ en retraite des praticiens doit être mesuré à cette aune, sauf à considérer qu’il y en a trop. Déclarer, comme le font nos responsables actuels, que la France est un des pays au monde les mieux pourvus en psychiatres, et que, dans les années qui viennent, les privés doivent aller aider leurs collègues du public, équivaut à rassurer les habitants d’un pays en voie de développement en leur disant de ne pas s’inquiéter parce qu’il y a globalement assez de richesses sur notre planète.
Un effet de seuil aura immanquablement lieu, et la menace de disparition annoncée qui pèse sur les psychiatres et leurs équipes, qui travaillent aujourd’hui en « flux tendus psychiques », ne risque-t-elle pas aboutir à l’effondrement de l’ensemble du dispositif des soins psychiatriques, alors qu’il montre à l’envi la nécessité de son existence et la pertinence de ses interventions ?
Sachons convaincre tous nos interlocuteurs de l’importance de ces enjeux afin de ne pas laisser les patients qui souffrent de troubles psychiques être emportés par cette catastrophe culturelle annoncée.