Hommage à Daniel Widlöcher (1929-2021)
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Hommage à Daniel Widlöcher (1929-2021)

Daniel Widlöcher était un « praticien » au sens étymologique et profond du terme : « celui qui possède la connaissance d’une science, d’une technique, d’un art, et en maîtrise l’usage ». Il a apporté aux soins psychiques une contribution exceptionnelle reconnue nationalement et internationalement. En cela il a été un digne successeur de Sigmund Freud par son incessante démarche de chercheur et d’enseignant pour tous ceux à qui il pouvait proposer cet esprit de quête d’ouverture, d’authenticité, de doute et de respect des débats que cela soulevait. Il était respectueux des apports et des controverses. Son goût du débat et son rejet de la dispute caractérisaient l’homme. Sa retenue sur le « pathos » n’excluait par un cœur généreux dans les relations et dans le soutien qu’il apportait avec intelligence et perspicacité sur les qualités et les limites de chacun.

Il a été un maître en psychiatrie, en psychologie et en psychanalyse. Il y a cinquante ans, comme beaucoup de jeunes psychiatres et psychologues, nous avons eu la chance au début de notre carrière d’avoir Daniel Widlöcher comme enseignant et comme patron du service de psychiatrie de la Salpêtrière. Nous avons été depuis parmi les personnes qui lui ont été les plus proches et reconnaissantes tout au long de sa vie. Comme pour beaucoup, il nous a accueillis, acceptés et formés comme un maître, un clinicien, un chercheur, un enseignant et un psychanalyste. Cette rencontre a marqué nos vies.

L’un de nous avait été amené à écrire l’ouvrage qui lui a été consacré dans la collection des PUF « les psychanalystes aujourd’hui » : « la vie de Daniel Widlöcher s’identifie à la psychanalyse telle qu’il aime la définir : tout autant une pratique culturelle qu’une pratique thérapeutique ; elle ne donne pas une vérité, elle ouvre une voie ». Daniel Widlöcher possédait une grande culture dans différents domaines et un goût du soin dont beaucoup ont bénéficié. Il a mis en valeur une compétence nécessaire dans nos métiers : écouter et savoir s’écouter écouter.

Cet esprit d’ouverture, il l’a manifesté pour la psychanalyse, pour la psychopathologie et aussi pour les différents déterminants des troubles mentaux sans jamais vouloir en faire une synthèse. Il n’a cessé de rendre compte de la complexité de nos métiers tout en gardant à l’esprit la nécessité de la rendre la plus simple possible mais jamais plus simple que possible.

Sa capacité de travail et de réflexion l’a amené à de hautes fonctions dans les institutions universitaires, hospitalières et de recherches scientifiques françaises mais aussi internationales.

Il a été le seul français avec Serge Lebovici à devenir pendant un mandat le président de l’International Psychoanalytic Association créée en 1910. Ses relations avec le monde psychanalytique international l’ont toujours intéressé et l’ont amené à avoir des relations amicales et des liens étroits avec Anna Freud, Donald Winnicott, les époux Sandler en Grande Bretagne ou les époux Kernberg aux États-Unis mais aussi beaucoup d’autres dans le monde, en Europe, en Suisse et sur d’autres continents.

L’ensemble de son œuvre et les liens avec ses « élèves » ont été le signe d’une de ses principales préoccupations : continuer de rendre l’approche analytique vivante, humaine et soignante. En France, il a ainsi soutenu le besoin de penser le continuum entre la psychanalyse et la psychothérapie avec beaucoup de leaders de la psychanalyse comme Didier et Annie Anzieu, Jean Laplanche ou Pierre Fedida pour ne citer que les plus proches de sa vie au sein de l’Association Psychanalytique de France.

Un hommage lui sera rendu en 2022 permettant de présenter les grands thèmes de recherches qu’il a approfondis et continuer ainsi à mieux les connaître et les travailler.

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