Accueillir les paradoxes de la demande des adolescents aux limites
Psychologue clinicienne pendant douze ans au sein de divers établissements de la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), ma pratique clinique a évolué au gré de ma rencontre avec des adolescents en souffrance et particulièrement rétifs à la démarche de soin. En effet, au sein de la PJJ nous rencontrons des adolescents en grande difficulté psycho-sociale dont le parcours est marqué par une instabilité de leur accueil dans les institutions. Ils ont été exclus des établissements scolaires, familles d’accueil, foyers de l’Aide sociale à l'enfance (ASE) et sont souvent en rupture avec leurs familles. Placés dans un cadre pénal majoritairement pour des actes de violences, il est probable que l’exclusion se rejoue au sein de l’institution PJJ et prenne la forme d’une escalade sur le plan pénal. Nous pensons ces répétitions de ruptures et d’exclusions comme l’échec des institutions à déjouer la tyrannie de l’exclusion fondamentale. Ces jeunes présentent des souffrances narcissiques et identitaires en lien avec des traumatismes précoces, des vécus d’empiètement, d’effraction non symbolisés, et réactualisés par le mouvement pubertaire. Ces souffrances brouillent les limites moi/non-moi et entraînent de manière défensive, une attaque des liens, prenant parfois la forme d’une véritable pathologie du contact (J-P. Pinel, 2020). Parallèlement à ces pathologies du lien, ces adolescents ont des assises narcissiques fragiles, et sont particulièrement en difficulté dans leurs capacités réflexives et de symbolisations.
Échec de l’orientation vers les services de soin
Face à la complexité de leur accueil, les professionnels de la PJJ sollicitent régulièrement les services de pédopsychiatrie avec l’idée que l’accompagnement de ces adolescents dépasse leur champ de compétence et qu’il est nécessaire d’avoir un…