La consultation de gastro-pédiatrie psychosomatique. Une affaire de traduction et de collaboration
article

La consultation de gastro-pédiatrie psychosomatique. Une affaire de traduction et de collaboration

Il y a trente ans Léon Kreisler a fondé le champ de la psychosomatique pédiatrique avec M. Soulé et M. Fain, à partir de son expérience de pédiatre et des concepts de l’école de psychosomatique de Paris de P. Marty. Fait notable, il a continué à exercer comme pédiatre durant toute sa carrière. Citons sa définition princeps de la psychosomatique : “Une conception doctrinale et pathogénique qui accepte et inclut les facteurs psychiques et conflictuels dans le déterminisme ou le développement des maladies physiques.” Il a ailleurs affirmé qu’il n’existe pas chez le bébé de maladie qui ne soit pas psychosomatique. Malgré l’originalité novatrice de ces apports montrant l’importance et la richesse de cette compréhension des maladies, les pédiatres restent aujourd’hui très résistants à la psychosomatique, alors qu’ils sont confrontés quotidiennement aux limites d’un abord monodisciplinaire.

Sans sous-estimer les qualités humaines de nombreux pédiatres, diverses raisons peuvent être évoquées à ce sujet : les modalités d’un enseignement médical scientiste et l’inertie des identifications universitaires initiales, la méfiance à l’égard d’une composante psychique rebelle à l’emprise déterministe, la croyance défensive en une césure psyché/soma, la peur de l’incompétence par manque de formation, et, enfin, la nature même de la vocation de pédiatre, bien souvent formation réactionnelle d’une “envie” déniée en direction de l’enfant sinon de l’infantile. Ces résistances sont particulièrement à l’œuvre devant les troubles fonctionnels de l’infans qui sont notre champ d’action et de réflexion car ils résonnent électivement avec les soubassements les plus archaïques du professionnel et des membres de la famille.

Nous allons nous centrer ici sur l’expérience d’une consultation de gastroentérologie pédiatrique chez le bébé, que nous nommons résolument psychosomatique pour nous situer explicitement dans la filiation de Léon Kreisler. Ce travail simultané sur le somatique et le psychique, a un double ancrage. D’une part, il s’appuie initialement sur l’apprentissage médical et pédiatrique, la connaissance de la physiologie digestive au travers de travaux antérieurs de recherche sur la motricité digestive, les neu-ropeptides et hormones digestifs. D’autre part, il continue d’évoluer au fil de l’expérience clinique en se nourrissant de l’investissement psychanalytique personnel du pédiatre, de ses lectures et de la collaboration le plus souvent indirecte avec des psychanalystes. C’est le refus du clivage soma/psyché du consultant pédiatre de première ligne qui constitue la spécificité de cet espace. Il se différencie des consultations de psychosomatique pratiquées par un psychanalyste à l’instar de celles de R. Debray ou G. Szwec à l’IPSO. Celles-ci ont été et sont encore des sources d’inspiration théorico-clinique essentielles pour nous mais elles se différencient des consultations de gastropédiatrie psychosomatiques car elles ont lieu en deuxième intention après le constat d’échec ou d’insuffisance de la pédiatrie “classique”.

Il faut souligner la rareté actuelle de ce type de cadre qui tente d’inscrire l’approche psychosomatique au cœur du réseau de soin pédiatrique et non dans une institution spécialisée. Cette militance s’exprime sans utopie ! De fait, qui est mieux placé que le pédiatre psychosomaticien pour appréhender la force des résistances tant des collègues “somaticiens” que de nombreux “psychistes” ?

Le symptôme et le corps de l’enfant

Le creuset de la consultation est le symptôme et le corps de l’enfant. Le bébé et ses parents consultent pour un symptôme somatique, fonctionnel, parfois lésionnel ; en regard de l’aspect médical de la situation, l’ambiance est souvent dramatique : théâtre du corps, expression riche de la souffrance biopsychique du bébé, ou masque somatique devant la souffrance psychique ; souffrance psychique du bébé, de la dyade, d’un ou des parents, de la triade ou du groupe famille ?

Le symptôme du bébé est polysémique, et exige une compréhension plurielle, l’utilisation parallèle et superposée de plusieurs grilles de lecture. On distingue une grille de lecture médicale, physique (sémiologie médicale infantile), une autre pour la lecture psychodynamique de l’enfant (sa “mosaïque première” ( P. Marty), sa vie psychique naissante, sa relation d’objet, ses conflits et angoisses), une troisième de lecture parentale (structurale, interactive et générationnel-le), et, enfin la grille de lecture de l’économie psychosomatique familiale. Le tramage de ces différents fils constitue ce que Léon Kreisler intitulait “l’anamnèse psychosomatique”. Elle inclut les différentes facettes des modalités intersubjectives parents/bébé.

La richesse du tableau clinique témoigne de l’impressionnante générosité d’expression du bébé si l’on se donne le temps d’observer et d’associer. Aucun enfant n’a exactement la même présentation. Ils consultent pour des troubles digestifs fonctionnels (reflux gastro-oesophagien (RGO), coliques, troubles du sommeil et pleurs inexpliqués), mais sur une définition médicale commune minimale et parfois floue, toutes les variantes sont possibles dans le scénario symptomatique médical et le contexte émotionnel infantile et parental. Dans le cas du RGO, un tel a des régurgitations très fréquentes survenant dès le début du repas et ne prend pas correctement de poids, l’autre semble tendu angoissé douloureux, a faim en permanence, s’alimente trop et régurgite avec une gène ou une douleur manifestes, est trop gros, l’autre régurgite ou vomit violemment par les narines et fait craindre à ses parents des risques de suffocation et de malaise grave. Tel bébé a des coliques qui se calment (en général trois jours) si l’on change de lait, un autre a des crises de coliques et de tension abdominale avec impossibilité à émettre ses selles, le troisième se calme dans un kangourou, en landau, en voiture. Ils ont en commun un orage pulsionnel et une désorganisation que les parents ne peuvent contenir ou auquel ils répondent par l’angoisse, et dont la mise en scène est toujours unique. Cette conviction dans l’approche casuistique de la consultation est pour nous un axe organisateur essentiel.

Ces troubles traduisent les avatars de l’intégration psychosomatique du bébé (D.W. Winnicott) et confrontent les professionnels aux angoisses archaïques du bébé et des parents (angoisse de mort subite inexpliquée du nourrisson (MSIN) chez les bébés qui ont un reflux, ou de dénutrition, angoisse de vidange, de liquéfaction ou d’explosion chez les bébés coliqueux).
Le symptôme peut disparaître comme par magie sans intervention médicamenteuse ou diététique, ou s’aggraver d’un jour à l’autre lors de modification de l’environnement extérieur (parental) ou de maladie intercurrente, constituer déjà un déplacement d’un symptôme antérieur, évoluer vers la mobilisation et l’amélioration ou la réédition d’aggravations ou de déplacements.

“Mais un bébé, cela n’existe pas !”

Du côté du bébé, le symptôme est polyfactoriel. Il s’inscrit sur une fragilité biologique, peut constituer un mécanisme de défense primitif, somatique, intra et intersubjectif, une projection, une expression ou une décharge d’excitation anxieuse.

Il n’est pas le symptôme du bébé seul mais de la dyade ou de la triade, avec une dimension relationnelle primaire ou secondaire liée à la réponse des parents au symptôme. Le climat interactif est souvent tendu, rapide et saccadé, dans la surstimulation anxieuse ou mécanique, plutôt que dans la carence. Il nous permet d’appréhender le degré de subjectivation du bébé ou l’existence d’une fusion plus ou moins mortifère, de percevoir des identifications projectives pathologiques aliénantes. Il peut sembler programmé, réédité de façon transgénérationnelle (par exemple le RGO qui était redouté par les parents se développe et s’aggrave jusqu’au malaise, ou apparaît dès les premiers jours de vie en maternité avec un malaise inaugural).

Du côté des parents, les maîtres mots sont la tension, l’angoisse, les mouvements agressifs inconscients sur fond de dépression périnatale, d’isolement affectif. Le symptôme met à l’épreuve ou en scène le degré de mentalisation des parents, un comportement opératoire ou une sidération post-traumatique, une dépression “blanche”. Sur une base biologique, dépendant de l’inconscient maternel (P. Marty), le symptôme a un sens virtuel dans l’histoire du bébé, l’histoire interactive et celle des parents, qui peut se faire jour dans la rencontre. La dyade ou triade pourrait être considérée comme une unité psychosomatique, le bébé venant exprimer avec son corps “à ses dépens” ce que les parents mentalisent mal (“l’exclusion somatique” de A. Green). Le symptôme peut être considéré comme un objet transitionnel “malléable” (C. Bollas) qui peut être façonné par l’un (le bébé) ou l’autre des protagonistes (mère ou parents), et utilisé ou non dans la communication. Le pédiatre utilise également le symptôme pour percevoir à travers sa présentation et sa description, le halo affectif et relationnel, la souffrance psychique individuelle des parents et du bébé et les aléas des interactions précoces.

La consultation : rythmes et traduction

Chaque consultation se développera selon un rythme singulier suivant la partition des rythmes croisés de ses acteurs, et cheminera plus ou moins avant dans le fonctionnement familial et individuel du bébé et des parents. C’est un abord de l’enfant dans sa globalité, et dans ses interactions avec le ou les parent(s) présent(s). La rencontre se déroule dans des mouvements souples d’allers et retours du somatique au psychique, du bébé aux parents et à leur histoire. L’accueil contenant, à un rythme un peu plus lent que celui du bébé et des parents, a déjà un effet d’apaisement et d’ouverture. On prend son temps et le rythme, au plus près du corps-psyché du bébé, on dialogue avec le bébé et son corps dans différents registres en situation d’interaction. On s’adresse successivement au bébé, aux parents et à son propre ressenti, on s’imprègne de l’atmosphère relationnelle, ce qui permet la rêverie et les associations en même temps que le décryptage physiologique.

Dans l’anamnèse psychosomatique (Kreisler), on part du symptôme et du biologique, qui est la demande des parents, la priorité de la consultation pédiatrique, préoccupation initiale nécessaire pour que quelque chose de la confiance s’instaure avec les parents. Parallèlement à cette anamnèse médicale, l’observation des interactions, de l’accès du bébé à la communication avec les parents, de ses réactions au discours parental module l’entretien en fonction de ce que l’on ressent et des intuitions qui émergent associativement. L’examen médical est un moment privilégié d’interactions physiques et verbales avec le bébé sous le regard des parents où l’on observe sa conso-labilité, où il peut mettre en scène ce que l’on percevait du récit des parents de la variabilité du symptôme physique. Tout au long de la consultation, le pédiatre met en jeu simultanément et dialectiquement une empathie primaire en direction du bébé et une empathie secondaire à l’égard des parents. L’empathie primaire correspond au co-senti et au langage d’action de l’enaction développé par S. Lebovici dans la consultations parents/bébé ; l’empathie secondaire correspond à la co-pensée via les identifications secondaires et les inférences décrites par D. Widlöcher dans la cure-type. La première est libre du clivage psyché/soma vis-à-vis du bébé et s’étaye sur une identification primitive au bébé, à son symptôme et ses relations, à son tempérament. La seconde se réfère aux identifications projectives parentales.

Le consultant est perméable et réceptif aux projections du bébé et des parents, sert de tiers, de lien externe et, in fine, dans le meilleur des cas, de traducteur contenant et détoxicant proposant une “fonction alpha” des identifications projectives pathologiques croisées des bébés et des parents (Bion). La psychosomatique est un travail en famille, famille du bébé et “famille psychanalytique” du soignant (psychanalyste collaborateur, analyste personnel et superviseur). On propose une recherche partagée de sens avec les parents, une mise en histoire actuelle et générationnelle, une mise en mots et en récit (narrativité) où les racines archaïques des angoisses de l’infans et du bébé dans l’adulte sont explorées.

La boussole “contre – transférentielle” du gastro-pédiatre

Le noyau de cette consultation est le travail de réflexion du pédiatre sur son ressenti physique et psychique, en utilisant ce que cela mobilise de son infantile. Cela lui permet, grâce à la mise en lien avec ce qu’apportent les parents, la liberté d’une rêverie et d’une construction interprétative internes qui vont être fondamentales dans son effort thérapeutique, sans que cela soit forcément formulé (“l’interprétation virtuelle” de M. Aisenstein). Il y a pour le bébé un travail de traduction : mise en sensations, émotions, hypothèses, de ce qu’il exprime avec son corps (la fonction alpha du pédiatre qui sert à penser le symptôme ?), évaluation de la situation : qu’en est-il respectivement des versants somatique et psychique de la souffrance, ce bébé est-il né psychiquement ? Où en est-il de sa subjectivation ? Quelle est sa partition dans la tension interactive, la place de son tempérament propre ? Ou est-il l’objet d’un fonctionnement parental opératoire et projectif aliénant ?

On propose aux parents une verbalisation à géométrie variable, selon l’ouverture possible et leur réceptivité : dans tous les cas on débute avec une mise au point médicale physiologique, en abordant de front les angoisses vitales, en explicitant les traitements utiles, nécessaires, inutiles. On évoque les origines multiples du symptôme, l’intrication psychésoma, son ressenti sur le contenu affectif de la situation, ses hypothèses.

On donne place à la vie psychique du bébé, sa subjectivité. Cette narration co-construite avec le clinicien, permet aux parents une mise en mots des affects et angoisses et les autorise à penser et à exprimer l’impensable : angoisses de mort, mais aussi, colère, rage, déception, voeux infanticides. On donne à ces sentiments un droit à l’existence, à l’élaboration, à la mise en perspective avec les traumas anciens ou de la grossesse, pour accéder à une ambivalence tempérée tolé-rable. Parfois, on offre seulement une contenance, une attention, avec une retenue de mots et d’interprétation. Des paroles simples peuvent être interprétantes dans leur proposition ou avoir un effet mutatif : parler du bébé comme d’un sujet humain doué d’affects, d’émotions, de son corps libidinalisé, légitimer la souffrance, les difficultés des parents, les mouvements agressifs. Le travail initial sur le somatique sert de base de sécurité, de point d’ancrage auquel on reviendra en fin de consultation. Il permet d’accéder à un moment d’accordage rythmique et de partage émotionnel. Les parents sont souvent surpris, déroutés, mais dans les bons cas se crée une respiration, une ouverture, et le bébé est plus vivant psy-chiquement. On a restauré quelque chose de l’optimisme, de la pulsion de vie, de la compétence à donner la vie et rompu la réédition mortifère.

La proposition d’une deuxième consultation assez proche, dont le délai peut être adapté le plus précisément possible par le clinicien en fonction de ce qu’il a perçu de la souffrance et du risque d’angoisse d’abandon des parents et de l’enfant, constitue également un arrière-plan contenant et rassurant. On ne quitte jamais en pensée le symptôme et l’angoisse vitale qui est la demande de la consultation.
C’est un des éléments les plus riches de la collaboration entre gastro-pédiatre psycho-somaticien et psychanalyste que de constater au fil des échanges la forte potentialité psychothérapique de ce type de consultation pédiatrique. Souvent celle-ci est suffisante pour faire céder le symptôme mais plus encore pour en rendre explicite la genèse chez l’enfant et sa famille. Ce schéma de la consultation pédiatrique psychosomatique tire son efficacité symbolique thérapeutique de son parallélisme avec l’épigenèse du foetus/infans où la conquête de l’espace psychique s’étaye sur le soma. S. Fraiberg a vu juste en positionnant les mécanismes de défenses psychiques de l’infans dans une étroite continuité avec ses mécanismes de défenses somatiques initiaux.

L’orientation ponctuelle vers le psychanalyste

Ces troubles précoces du bébé surviennent à une période originaire, avant le langage, où le vital est au premier plan. Ils ont une importante aura d’organicité, résonnent avec les angoisses archaïques et les défenses communes des parents et des soignants du corps, en sorte que la composante psychologique est souvent mal acceptée, paraît incongrue. Il peut exister un véritable déni de la souffrance psychique du bébé qui est culpabilisante pour les parents, disqualifiante sur leur capacité à avoir un bébé heureux et bien portant, et réveille leurs propres souffrances infantiles. C’est pourquoi l’ouverture à la souffrance psychique du bébé ne peut être que très prudente et contenante en raison du risque de rupture.

Sa révélation, dans cette consultation, expose à la culpabilité et à l’affect dépressif maternels qui peuvent, l’une comme l’autre, constituer une forme de résistance et d’omnipotence qui bloque toute ouverture et tout changement. De même l’angoisse de mort pour soi et pour l’autre, l’angoisse de la mère de sa propre destructivité et de son incompétence peuvent empêcher toute mobilisation et confiner dans le somatique. Parfois les défenses parentales sont rigides et le scientisme entraîne la fermeture. Ces caractéristiques font de ces situations des indications privilégiées de travail indirect entre pédiatre et psychanalyste. Cependant, certains dysfonctionnements à risque justifient pour le bébé l’envoi de la famille en consultation psychothérapique. C’est le cas lorsque la dépression maternelle doit être prise en charge per se et met en péril le développement du bébé, ou en présence d’une mère border-line. Parfois la situation paraît totalement énigmatique, les défenses parentales ne permettent aucune mise en sens. Un fonctionnement psychosomatique peut être installé dans la réédition avec des déplacements successifs des symptômes et des maladies. Ces situations requièrent un abord différencié du registre de départ, dans un cadre différent avec d’autres compétences. Il s’agit alors d’un travail de partage et de passage.

Les modalités de l’envoi

Elles sont particulières du fait que la demande initiale est enracinée dans le problème soma-tique du bébé et adressée à un gastro-pédiatre, et nécessitent de la part du pédiatre une négociation pleine de tact, au cas par cas. Différer la demande d’orientation psychothérapeutique des parents chez un bébé en pleine maturation peut certes faire perdre un temps précieux et aller contre le traitement de l’enfant, mais provoquer imprudemment la réticence des parents compromettra largement le succès de la prise en charge psychothérapique. Tout l’art du pédiatre est de proposer et d’argumenter au bon rythme cette orientation. L’envoi doit donc s’appuyer sur des arguments tirés de l’analyse de la situation, (sur une synthèse des données organiques et psychologiques recueillies lors des premières consultations) énoncée en présence des parents.

Les modalités de la collaboration

L’orientation vers le psychanalyste n’est pas un lâchage. Le travail du gastro-pédiatre se poursuit conjointement. Il s’agit d’une collaboration personnalisée. Le psychanalyste est connu, présenté explicitement aux parents. Il est informé de l’envoi du patient (par courrier ou directement de vive voix). Cette collaboration repose sur des échanges réguliers, des allers et retours de l’information. Ce partage nécessite un temps de réunion et de parole régulier. Notre expérience commune de collaboration directe et indirecte avec les familles plaide en faveur d’une synergie ponctuelle diagnostique et thérapeutique. Chaque co-thérapeute apporte alors dans l’échange son bagage et son expérience spécifique : la rencontre et la défense de l’originalité de chacun est la meilleure garantie pour lutter contre le clivage entre les thérapeutes du corps et ceux de la psyché. Chemin faisant, cette bipolarité révèle une souplesse qui permet aux familles d’exprimer leurs variations d’investissement dans chaque discipline et chaque personne et d’en jouer tout au long de notre suivi.

La formation continue du pédiatre

Il est sensible qu’au fil de la collaboration et de l’apprentissage mutuel avec le psychana-lyste, le pédiatre a une acuité accrue face à l’énigmatique familial, et peut tenir plus souvent en équilibre seul sur la ligne de crête psychosomatique. Au final, le tissage des liens entre symptômes et affects du bébé, parents et bébé, consultant et famille, pédiatre et psychanalyste, médecine et psychanalyse met en relief les enjeux intersubjectifs des relations humaines. L’originalité de la consultation pédiatrique psychosomatique est d’accorder une place centrale à cette intersubjectivité, condition de la naissance psychique du bébé.

Bibliographie

Kreisler L., Fain M., Soulé M., (1974). L’enfant et son corps, Paris, Puf.

Missonnier S., Boige N., (1999). “Je reflue donc je suis, Vers une approche psychosomatique du reflux gastro-oesophagien du nourrisson”. Devenir, vol.11, n°3, 51-84.

Missonnier S., (2004). “L’empathie dans les consultations thérapeutiques parents/bébé”. Revue Française de Psychanalyse, n°3, 177-194.

Aisenstein M., (2008), Contre la notion de psychothérapie psychanalytique In Widlöcher D., Psychanalyse et Psychothérapie, Erès.