Jean Allouch, psychanalyste, nous livre sa vision de la psychanalyse au travers d’un entretien direct. Un témoignage sensible sur une discipline dont il dit qu’elle est « pariasitaire ».
Propos recueillis par Stéphane Breton
Qu'est-ce qui a motivé votre désir de devenir analyste ?
La psychanalyse fut et reste une invention de la folie. Ce trait la distingue des disciplines connexes (psychiatrie, psychologie, psychopathologie, criminologie) qui, toutes, sont issues de la société et au service de celle-ci. Leur formule est : « Il faut défendre la société. » Ainsi le crime fut-il régulièrement vu comme une atteinte à la vie en société et les meurtriers condamnés à ce titre, cela depuis le tout début des rapports des instances psychiatriques et judiciaires. La psychanalyse a creusé son fragile lieu… ailleurs, aux côtés de certains de ceux que la société rejette. Il arrive que, diagnostics aidant, la psychanalyse véhicule elle aussi une norme et soit donc rejetante. Une malédiction la frappe, elle qui fait souvent virer le descriptif au prescriptif. Il n’empêche, je la dis et la veux une discipline « pariasitaire ». Elle n’est pas du côté du manche, là où l’on dit aux gens comment penser et surtout se comporter.
Il faut avoir eu affaire de près à la folie, s’être heurté à elle avec les yeux clairvoyants d’un enfant pour, un jour, plus tard, avoir tenu à exercer la psychanalyse – ce qui reste une folie. Et l’on peut ici évoquer une phrase de Pascal, celle que Michel Foucault reprit dans son Histoire de la folie à l’âge classique : « Les hommes sont si nécessairement fous que ce serait être fou par un…