Le gène, l’environnement et la psychiatrie
Éditorial

Le gène, l’environnement et la psychiatrie

Où en sommes-nous de la lancinante question de la place des facteurs exogènes et endogènes dans la transmission des troubles mentaux et du comportement ? Le 12ème Congrès de la Société Européenne de la Psychiatrie de l’Enfant et de l’Adolescent qui vient de se tenir à Paris du 29 septembre au 1er octobre a permis de faire le point sur l’état de nos connaissances sur ce sujet.

Il a été rappelé l’importance de la transmission trans-générationnelle et le rôle des projections psychiques dans la cristallisation et la perpétuation des angoisses et des affects dépressifs d’une génération à l’autre. Une fois de plus l’importance structurelle des interactions précoces dans l’organisation de la qualité des attachements a été soulignée ainsi que la pérennité de ces modes d’attachement et leur rôle de protection ou au contraire de vulnérabilité. Mais d’autres facteurs apparaissent de plus en plus nettement en particulier ceux liés à une vulnérabilité génétique.  La découverte progressive des supports génétiques des comportements permet à partir des modèles animaux, mais aussi des études chez l’homme, de mieux comprendre comment l’expressivité de facteurs toujours polygéniques peut être freinée ou au contraire renforcée selon l’environnement rencontré. La présence de facteurs génétiques de vulnérabilité, par exemple dans le domaine de l’agressivité, ne condamne pas le sujet à des comportements violents, notamment dans un environnement favorable, mais dans le cas contraire, dans un environnement défavorable et d’événements traumatiques la violence de ces  comportements sera beaucoup plus importante que celle d’un sujet n’ayant pas cette même vulnérabilité.

Le domaine de la  psychiatrie m’apparaît ainsi de plus en plus nettement comme celui de l’étude des contraintes d’ordre interne ou externe, psychologique et biologique qui pèsent sur le sujet et l’obligent à l’adopter des comportements qui l’imputent d’une partie plus ou moins importante de ses potentialités et en freinent le développement. Il va s’agir d’aider ce sujet à se donner les outils d’ordre psychologiques et biologiques susceptibles de l’aider à lever le poids de ses contraintes et à lui redonner ce qui fait le propre de l’être humain : un minimum de capacités de choix, donc un minimum de liberté. Ces outils ne sauraient dépendre de nos préférences individuelles, ni de nos choix idéologiques, mais ils doivent  être proposés au patient en fonction de ce que l’on connaît de leur pouvoir libérateur, et donc thérapeutique, et à la « limite à l’essai » en fonction des effets qu’ils auront sur lui.