L’inconscient est politiquement incorrect, une fois pour toutes !
Éditorial

L’inconscient est politiquement incorrect, une fois pour toutes !

L’actualité du monde dans lequel nous vivons rend particulièrement sensible à quel point la liberté politique est très loin d’être une aspiration généralisée. Plus que jamais la servitude volontaire multiplie les adeptes.
Et que dire alors de la liberté psychique… Il m’est arrivé, quand se précise l’engagement d’une cure, de faire face à l’angoisse d’un analysant qui pourrait se formuler ainsi : « Qu’est-ce que je risque ? Où tout cela va-t-il me mener ? » Et moi, sinon de lui répondre, au moins de ne pas ajouter à son angoisse le silence de celui qui n’entend pas, j’ai dit : « Le risque… devenir un peu plus libre qu’avant ».

À la différence du sujet politiquement ou religieusement asservi et de l’analysant prisonnier de ses auto-entraves, on pourrait espérer du psychanalyste, ce praticien de la liberté, qu’il dispose en la matière d’une marge que les autres n’ont pas. On est loin du compte. Peut-on être psychanalyste et homosexuel ? À cette question de Jones, Freud répond en 1921 : pas plus que l’on ne peut cautionner la poursuite légale de l’homosexualité, on ne peut refuser sur cette base,l’accès à la formation. L’admission relève de « l’examen des qualités du candidat », et non de son choix d’objet sexuel. Il faudra 80 ans à l’IPA (2001), pour en faire enfin sa doctrine !

Qu’à cela ne tienne, le refoulement, qui a plus d’un tour dans son sac, a emprunté le chemin inverse, celui de la « gay identity ». Richard Isay, le premier (aux USA), suivi par bien d’autres depuis, a soutenu l’idée que seul un homosexuel serait un psychanalyse compétent pour le patient homo. On imagine la suite : les femmes avec les femmes, etc… « L’identité » a un passé et un présent politiques dont on ne connaît que trop les attendus. Une prison chasse l’autre. Il est décidément difficile pour les psychanalystes d’être à la hauteur de la découverte freudienne. L’inconscient est politiquement incorrect, une fois pour toutes. Nous sommes beaucoup plus libres que nous ne le savons, beaucoup plus libres que nous ne le souhaitons.  

Jacques André
vient de publier aux éditions Stock L’inconscient est politiquement incorrect