Y a-t-il une autre épreuve que la clinique pour le psychanalyste ? La psychanalyse sans la clinique serait sans doute une méthode philosophique « une grande école du soupçon » comme l’a définie Paul Ricœur, voire une forme d’interprétation critique qui ne cherche pas à comprendre mais à démasquer et qui fait de Freud un grand herméneute aux côtés de Nietzsche et des penseurs marxistes, pour en faire un pourfendeur des illusions de notre pauvre humanité. Freud a inventé la psychanalyse à l’épreuve de la clinique. Il a posé ses mains sur les patientes, a trop parlé, trop de mots, jusqu’à ce qu’une patiente lui demande de se taire, puis il a cessé l’hypnose et introduit le dispositif divan-fauteuil. Marie Bonaparte le décrit marchant, se levant, s’engageant dans les cures de tout son être. Freud n’a cessé de modifier ses théories en fonction de ce qu’il a rencontré dans sa clinique : le narcissisme, la névrose traumatique, la pulsion de mort, la réaction thérapeutique négative. Ce que produit la rencontre avec le patient, telle est l’épreuve de la clinique. D’autant que « l’expérience n’a jamais cessé de démontrer l’inadéquation de la cure de divan pour un certain nombre de cas qui apparemment en relevaient, et en revanche la possibilité d’un travail psychanalytique, efficace et suffisant, en face-à-face » comme le note si pertinemment Raymond Cahn (2008, p. 15). Mais que faisons-nous chacun de ce constat d’inadéquation et quels enseignements en tire-t-on ? C’est l’épreuve de la pratique. La mienne, c’est trente ans de pratique privée et quinze années de travail au centre Jean Favreau comme consultante et thérapeute.
Mais qui sont les patients ?
On peut distinguer avec Raymond Cahn (2008) trois catégories de patients ; j’en ajouterai une quatrième.
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