Écrire et signer à quatre mains un livre sur la technique psychanalytique dit d’emblée quelque chose de la disposition singulière des auteurs quant au sujet qu’ils se sont donnés d’explorer. Ce n’est pas exactement une modestie, ni un esprit de partage, mais plutôt le fait d’avoir atteint le moment où, comme analyste, on en sait suffisamment sur l’analyse pour ne donner que les seuls conseils qui peuvent marcher : ceux dont on a fait l’expérience sur soi-même. C’est ainsi que j’ai lu ce livre, à la fois très freudien, et très personnel. Ainsi, en même temps qu’un livre sur la technique (chacun s’appropriant le mot pour suivre sa recherche – historique, critique, transférentielle), c’est un livre sur la façon d’apprendre à se faire confiance, comme analyste, et comme être humain qui a choisi la psychanalyse pour destin. Chaque analyste est, par ce livre, autorisé à être l’archéologue de sa guérison par la psychanalyse. Ce qui n’est pas exactement la même chose qu’être spécialiste (des addictions, des bébés, des psychotiques) parce qu’on a été très loin dans la guérison de certains aspects de sa personnalité ; ce qui n’est pas non plus une sublimation ; mais une façon, après coup, de s’apercevoir de ce qu’il s’est passé, des choix qu’on a fait (de parler ou de se taire ; de lire certains livres plutôt que d’autres ; entre des nuances conceptuelles et des mots plus intéressants que d’autres). Les auteurs m’invitent à me demander, nous invitent : de quels outils de ma propre analyse je suis devenu l’auteur, et le seul garant, à un certain point, dans la conduite de la cure de mes patients ?
Dans la reconnaissance de cette expérience qui doit presque tout au transfert, au corps, à des questions de durée, d’amour et de « dédain »,…