J’aimerais pouvoir écrire à mon tour une lettre à l’auteure de ce très beau livre, moins pour inaugurer avec elle une correspondance (bien que nous y soyons explicitement invités), que pour tenter de correspondre -comme interlocuteur- au dialogue que ses riches et plaisantes pages nous proposent et pour essayer de rendre quelque chose, à vous, lecteur de ce billet, de leur mouvement, de leur son et de leur ton. Non seulement de leur contenu -passionnant- mais du climat intérieur de la lecture de ses lettres. Car le mode épistolaire est probablement la forme la plus ouverte des écritures. Etrangement, alors qu’une lettre par définition s’adresse à un destinataire désigné, elle paraît impliquer d’emblée un tiers et se laisser ainsi ouvrir virtuellement à d’autres, voire nécessiter ce partage.
Toute lettre serait une sorte de « lettre ouverte », pense-t-on en lisant ce livre. Des lettres vives. C’est peut-être la raison pour laquelle Gilberte Gensel, psychanalyste membre de l’Association Psychanalytique de France (APF), a choisi cette modalité d’expression en prenant publiquement sa plume pour s’adresser à Lou-Andreas Salomé, à Christine Angot, à Alexis Géra (le personnage de Marguerite Yourcenar), à Sigmund Freud, à Donald Winnicott, à Adam Phillips (le psychanalyste britannique), à Jacques Lacan, à Michel Gribinski (directeur de la riche collection qui publie ce recueil), à nous, lecteurs. Pourquoi faire ? Pour dialoguer imaginairement avec eux, certes, mais surtout avec nous. Pour converser, dirait Jean-Bertrand Pontalis, avec ses lecteurs sur des questions très importantes de psychanalyse. Un dialogue tout aussi libre, incomplet à dessein, confiant, intéressé et franc que précis, sérieux, grave, orienté et rigoureux. Le cadre idéal pour mener une discussion, faire avancer un débat. Mais sur quoi ? Sur tout. Tout ce qui touche à la pratique et à la…