Terreur et terrorisme. Questionnements psychanalytiques
Éditorial

Terreur et terrorisme. Questionnements psychanalytiques

L’imprévisibilité des attaques terroristes et leur répétition ont transformé le trauma en un trauma processuel avec une extension en tache d’huile qui ne trouve pas de limites. Notre état de sidération initiale s’est transformé en effet boomerang qui trouve difficilement son effet d’après-coup car le trauma en continu bouleverse nos notions de temporalité : nous sommes en permanence dans un immédiat après-coup ou dans un immédiat avant-coup. Il y a un court-circuit ou un circuit bien court pour nous permettre de trouver un espace de pensées, de dégagement pour sortir de l’emprise du réel. Des « spécialistes » de tous bords, journalistes, philosophes, historiens, écrivains, « essayistes » … tout le monde parle, écrit à propos et sur les attentats, cette multiplicité traduisant la nécessité de mises en mots et en paroles. Nous aussi, psychanalystes, parlons, discutons et écrivons !
Et parfois, nous ressentons comme un léger agacement devant notre propre boulimie : comprendre, évoquer des hypothèses théoriques, tenter d’élaborer. Quels difficiles questionnements !  

Je me suis étonnée de m’être mise à rechercher les moments où la psychanalyse s’est créée, transformée, complétée, discutée. Comment ne pas penser que le fameux « tournant de 1920 » avec la deuxième topique et la théorie des pulsions soit arrivé après la confrontation de Freud avec la Grande Guerre ? Je reste toujours impressionnée par le nombre et la pertinence des fameuses « notes en bas de page » dans les textes dits fondateurs de Freud, il fallait modifier, affiner, ré-exprimer une idée, un concept et aller toujours plus loin.

Nous connaissons tous sa métaphore du chimiste : « le psychanalyste sait qu’il travaille avec les forces les plus explosives et qu’il lui faut la même prudence et la même scrupulosité que le chimiste ». C’est ce que nous allons tenter de faire dans ce dossier : travailler sur des matières explosives.