Il est désormais admis que le développement débridé des activités humaines est responsable de la dégradation des conditions d’habitabilité de la planète. La perte accélérée de la biodiversité et les conséquences du changement climatique commencent à devenir tangibles au quotidien (disparition d’espèces familières, feux de forêt, canicules, pénurie d’eau, etc.). Tout indique que notre avenir, et celui de nos enfants seront marqués par une recrudescence d’évènements qui auront un impact dramatique sur nos sociétés (vagues de chaleur, feux de forêt, inondations, tempêtes ou cyclones, pénuries d’eau, etc., engendrant pertes humaines et matérielles, migrations massives, conflits, etc.). Le spectre des catastrophes à venir crée un horizon d’angoisse qui a d’ores et déjà des conséquences importantes sur nos vies, en particulier pour ceux qui sont en âge, selon l’expression consacrée, de « construire leur avenir ». « Se projeter » devient un exercice périlleux quand les représentations en circulation dans le monde social, mises en scène notamment dans les récits médiatiques, renvoient sans cesse à l’imminence de la catastrophe.
L’éco-anxiété relève davantage de la crainte diffuse de la catastrophe à venir que de l’expérience d’une catastrophe réalisée. Mais l’étude des situations de catastrophes passées peut fournir de précieux enseignements cliniques. Le travail de recherche que j’ai eu l’occasion de mener sur différents terrains m’a ainsi convaincue de l’importance du rôle des narratifs « en circulation » dans le social dans le vécu des personnes affectées par la catastrophe (ou sa menace). Je montre ici comment les propos tenus dans les arènes médiatiques, politiques, scientifiques, etc., peuvent contribuer — par leurs effets d’assignation — à entretenir le caractère effractant de l’évènement pour le sujet. Je propose de considérer que les narratifs en circulation à propos de la crise environnementale et climatique produisent des effets semblables sur nos imaginaires et invite…