C’est une belle et grande fille, une belle plante comme on dit, vive, joyeuse (un peu trop peut-être), directe, dépourvue d’inhibition, semble-t-il, et extraordinairement à l’aise, d’emblée. Elle ne ressemble pas aux jeunes filles qui d’habitude viennent me voir, elle se présente comme une femme, une vraie, assumant ses formes un rien voluptueuses et une sensualité accrue par la plénitude de son visage et les couleurs de miel qui assortissent son teint et sa chevelure. Evidemment, quand on est analyste, on prête grande attention à ces éléments manifestes -nous perdrions beaucoup ne pas les percevoir- et en même temps, l’attention est alertée par le dessous des mots et des choses (Le dessous des choses est le titre d’un très bel essai de Patrick Autréaux). Le dessous, chez Athénaïs, apparaît tout de suite dans le récit évènementiel qui sert de motif à notre rencontre. Elle n’a pas 20 ans, sa sœur aînée est morte accidentellement un an plus tôt, peu de temps après qu’elle-même ait été très éprouvée par une expérience particulièrement traumatisante : le nouvel ami avec lequel elle entretenait une relation amoureuse intense, l’avait violentée et avait tenté de la tuer, au cours d’une crise de violence extrême, brutale, imprévue. Soutenue par sa famille et surtout par sa sœur, elle avait porté plainte, il y avait eu un procès et elle l’avait perdu, le jeune homme ayant été jugé « non responsable ».
Au cours de notre premier entretien, elle pleure abondamment mais sèche très vite ses larmes, et se laisse porter par une rage qu’elle exprime avec une grande crudité de langage : elle parle fort et trouve les mots les plus rudes, les plus durs pour dire sa haine contre les hommes et tout autant contre la faiblesse des femmes qui se…