Samuel Beckett. D’une langue à l’autre : l’outre-verbe

Samuel Beckett. D’une langue à l’autre : l’outre-verbe

Yohann Loisel

Editions Hors collections, 2020

Bloc-notes

Samuel Beckett. D’une langue à l’autre : l’outre-verbe

« A cheval sur une tombe est une naissance difficile - du fond du trou (…) le fossoyeur applique ses fers ». (Didi, En attendant Godot).

Boulevard Arago, Samuel Beckett est à sa fenêtre, il peut voir les cours de la prison de la Santé, l’emplacement réservé à la guillotine… mais un homme à sa fenêtre n’observe-t-il pas plutôt sa prison intérieure, celle dont il est le geôlier et dont il cherche les clés et la serrure, celles qui ouvrent sur une autre prison… extérieure celle-là. Si Beckett ne croit plus aux clefs et aux serrures, s’il défait le langage comme prise de pouvoir, s’il laisse se déployer l’infini et multiple non- langage, et dans un devenir animal « couché plutôt que debout » c’est pour faire éclater de rire ses prisons.

Mais le voilà qui descend la rue Messier, salue à droite Blaise Cendrars rue Jean Dolent, et à gauche Alexandre Vialatte, rue Léon Maurice Nordmann. Son amour à lui, ça n’est pas celui des mots, comme ça l’était pour ces deux là, mais celui de la parole qui brise le langage.

Un peu plus bas, il revoit l’hôtel PLM où il aurait eu ses habitudes, juste devant l’hôpital Sainte-Anne où il a quelques amis et où sûrement un psy administratif idiot aura bientôt l’idée saugrenue de nommer une allée Samuel Beckett.

Il le contourne pour prendre l’avenue René Coty (ce drôle de président de la République modéré qui laissera sa place à Charles De Gaulle), sachant déjà (prédicteur-cassandre) qu’on creusera bientôt au cœur de celle-ci une allée qui portera son nom.

Ce grand marcheur (pour « niquer…

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