Bernard Touati nous conduit au cœur même d’une pratique du psychodrame particulièrement convaincante quant à la valeur thérapeutique de ce mode de traitement, en particulier chez des enfants pour qui la rupture de la communication entre eux et les autres est le fait central, insufflant à chaque intervenant de sa vie quotidienne cette impression d’attente vertigineusement déçue. Caméo par exemple, dans son institution, se jetait dans les bras de son soignant, plongeait son regard dans le sien, puis brutalement s’échappait. Le soignant enfermé dans une spirale paradoxale qui rend fou en est « le jouet » : décider d’en sortir c’est y tomber, s’y opposer c’est s’y soumettre. La situation induit une impression « d’annihilation » qui gagne toute l’équipe qui se déprime devant l’échec de l’abord psychothérapeutique individuel, les soignants se sentant pris dans une emprise paralysante qui les expose à un retrait passif ou à des pensées violentes envers l’enfant, lesquelles accroissaient encore leur culpabilité de ne pas arriver à sortir l’enfant de son système. C’est là que peut intervenir le psychodrame, c’est-à-dire un mode de psychothérapie à plusieurs.
Bernard Touati nous fait vivre le début du psychodrame avec Caméo : « Le lutin arrive en sautillant et manipulant un petit bout de papier qu’il approche parfois de son oreille. Il est attentif, à fleur de peau. Il peut rompre et nous planter là ». Le meneur de jeu s’appuie sur d’infimes indices, regards, gestes, mimiques… pour proposer des scènes au « lutin » qui y participe à sa façon. Il chantonne une mélodie dont les soignants connaissent les paroles : il a une drôle de tête ce type-là… Qu’est-ce qu’il fait ? Qu’est-ce qu’il a, qui c’est celui-là ? » Le comportement paradoxal de Caméo qui se jette dans les bras puis s’enfuit, prend grâce au groupe une forme : il fuit l’un…
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