Comment la psychanalyse perdure
Il y a dix ou vingt ans, les psychanalystes débattaient entre eux sur le fait de savoir s’il fallait admettre à côté de la cure classique sur le divan à trois séances par semaines, d’autres modalités de travail analytique — en face à face, ou à deux séances sur le divan, ou en groupe, ou avec l’enfant et l’adolescent, etc. L’opinion prévalante était qu’il s’agissait en ces cas d’une psychanalyse plus compliquée, mais aussi moins aboutie1.
Ces dernières années, les jeunes psychiatres et psychologues ne reçoivent plus qu’un enseignement universitaire en psychanalyse diminué ou inexistant. Des conditions de travail dégradées, le contrôle bureaucratique des actes, dissuadent de travailler en institution médico-psychologique. Par ailleurs, les technologies d’internet imposent des systèmes de consultation paramétrés par des logiciels extérieurs au métier (Doctolib) et rendent possibles des entretiens cliniques par écrans interposés tandis que l’idéologie individualiste d’un soi-même roi invite à s’autoproclamer thérapeute sans considérer l’exigence d’une formation postuniversitaire longue et difficile. La discussion a désormais lieu dans toute la société, plus seulement entre psychanalystes, dans le contexte d’une paramédicalisation des psychologues, de séances remboursées à bas prix, mais aussi d’un intérêt pour ce qu’il reste de psychanalyse dans les psychothérapies (par exemple l’engouement pour la série télévisuelle En thérapie). Le champ des thérapies s’étend loin du protocole de la cure analytique classique, l’intérêt pour la psychanalyse perdure. Comment comprendre cette contradiction ?
André Green compare2 les demandes de personnes ayant fait des cures classiques qu’elles trouvent insatisfaisantes et les demandes de personnes ayant fait sans résultat notable des thérapies de toute espèce. Aux premières il propose un travail analytique en face à face et aux secondes, une cure…