Dans le prolongement de ses travaux sur la psychodynamique du travail, Christophe Dejours nous propose l'itinéraire d'un psychanalyste à la rencontre d'autres disciplines.
Propos recueillis par Alexandre Morel.
Carnet Psy : Christophe Dejours, bonjour. Merci d’accepter de parler de votre travail pour les lecteurs de Carnet Psy. Je souhaite d’abord que vous puissiez évoquer votre parcours et la manière dont vous vous inscrivez dans cette discipline que vous avez participé à créer, la psychodynamique du travail.
Je suis de la génération de mai 1968, c’est une conjoncture particulière. Je suis devenu médecin du travail, et puis j’ai enseigné la médecine du travail, comme assistant à la Fac de médecine. Puis j’ai fait une formation en ergonomie au Conservatoire national des Arts et Métiers. Et là, il y a eu une rencontre très forte avec cette discipline qui était en voie de développement, mais encore assez jeune, spécialement dévolue à l’étude des rapports entre l’homme et le travail. Mais les questions psychologiques et surtout psychopathologiques y étaient assez mal formulées.
Je m’appuyais sur la psychanalyse, parce que j’avais fait médecine pour devenir psychanalyste. Et j’ai mené une autre démarche de l’autre côté, du côté de la biologie, avec le développement de la psychosomatique.
Il y a eu une rencontre intellectuellement féconde entre le point de vue du psychanalyste, sur le fonctionnement psychique, et le travail vu par les ergonomes. C’est-à-dire portant vraiment à l’intérieur même de la matérialité du travail, ce que ne faisaient pas du tout les autres disciplines comme l’économie du travail, la sociologie du travail, l’anthropologie du travail, l’histoire du travail. Qu’est-ce que le travail ? Il y a…