Lorsque l’on parle de « grille symptomatique », on désigne un raisonnement clinique fondé sur des symptômes d’expression comportementale et extériorisée ; une référence implicite peut être faite aux classifications internationales, CIM-10 ou DSM 5, construites sur des critères diagnostiques voulus comme objectivables, et progressivement devenus hégémoniques dans le quotidien des soignants en psychiatrie, une sorte de « notice universelle » selon l’expression de Corcos1. En effet, ils sont à la fois un support d’apprentissage de la sémiologie, un guide pour l’indication et la prescription d’un traitement médicamenteux, une justification pour le remboursement des dépenses de santé et un indicateur de l’activité des services (donc un élément de calcul de leur budget). La tarification à l’activité n’est pas -encore- en vigueur en psychiatrie, mais le recueil, à visée évaluative, des pathologies et des actes réalisés par les cliniciens (le « codage ») est bel et bien devenu un impératif quotidien. La « grille symptomatique » préfigurerait-elle alors la grille de l’hôpital, la porte d’entrée du service de psychiatrie, celle de la chambre d’isolement ? Serait-elle celle à travers laquelle le clinicien pourrait observer le patient, à distance, à l’abri, avec parfois le sentiment rassurant d’être « du bon côté » ? N’oublions pas qu’une grille a pour fonction d’organiser (un espace, un raisonnement), mais aussi de séparer, voire d’empêcher un passage, même si l’on peut reconnaître à la grille l’avantage de laisser passer la lumière et le son, et de permettre de se toucher à travers le treillis...
Approchons-nous de notre « grille », et de ce patient que l’on espèrerait voir à travers. La question des « troubles du comportement » mérite tout particulièrement notre attention, car elle entretient avec cette « grille symptomatique » des rapports intenses, synergiques, voire pervers. En effet, en dehors d’une perspective diachronique, le symptôme ne parle pas : il ne peut que s’observer, ponctuellement.…