Je vais proposer quelques réflexions concernant les processus à l’aube de la subjectivation, à partir d’une double pratique : une pratique psychanalytique auprès d’adultes, d’enfants, et une pratique d’observation de bébés. Ces réflexions s’appuieront aussi sur l’idée que l’expérience auprès du bébé, la connaissance du bébé et des particularités du lien parent-bébé, peut aider à construire des modèles du soin psychique en général et du travail psychanalytique en particulier ou de certains de ses aspects.
J’esquisserai simplement trois idées :
- la première consiste à dire que le travail de subjectivation, de saisie des expériences subjectives s’appuie, pour partie, sur des processus de partage d’expériences, et en particulier de partage d’expériences émotionnelles et affectives ;
- la seconde idée est celle selon laquelle le travail psychique de subjectivation suppose et repose sur une rythmicité de telles expériences ;
- la troisième, enfin, soulignera la manière dont ces considérations concernent tout autant le développement psychique du bébé que le développement du processus psychanalytique et de l’expérience de rencontre que le dispositif psychanalytique permet et soutient.
Subjectivation et partage intersubjectif d’expériences
Je soulignerai donc d’abord l’idée que le travail de subjectivation, de saisie, d’appropriation d’une expérience subjective, suppose l’expérience d’un partage, et d’abord d’un partage émotionnel, affectif. Autrement dit, la subjectivation suppose la création et le passage par des aires intersubjectives d’expériences. Le partage d’expériences, d’émotions, d’affects, est à la fois l’une des figures ou l’une des scènes de l’intersubjectivité et l’une des conditions de sa constitution. La notion d’intersubjectivité a un double sens. Elle désigne à la fois ce qui sépare, ce qui crée un écart, et ce qui est commun, ce qui articule deux ou plusieurs subjectivités. L’intersubjectivité est à la fois…