Faire tache dans le tableau
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Faire tache dans le tableau

Quand ils disent : « Tu devrais avoir honte » et non « Tu devrais te sentir coupable », les parents de l’enfant savent que la faute reprochée résulte d’une rupture avec les idéaux qu’ils croyaient transmis. Cette honte les affecte et à leur tour, par réverbération, on est honteux pour nos enfants, de même qu’ils ont honte pour nous. Les remodelages identificatoires à l’adolescence connaissent des ruptures dans les idéaux : l’adolescent les souhaite et les redoute à la fois. Ils en sont auteurs et victimes, ils les revendiquent crânement et se plaignent des effets qu’ils occasionnent, ils doivent endurer la solitude à laquelle cette rupture les condamne.

Passage à l’informe

Ils perdent contenance, perdent forme, « se liquéfient » disent-ils. Et pourtant, dans ce passage de la forme à l’informe, ils voient une distinction qui les sort du lot. Pour Monique Schneider, « Emerger dans le visible » - de la matrice - est à la fois fondateur de la honte et honte fondatrice du sujet1. La honte se présente toujours comme une aporie. Une patiente, Pascale, a souvent évoqué ce souvenir d’enfance : sa sœur s’est soulagée dans la rue, simplement cachée par une voiture. Pascale, de l’autre côté, se penche dans la « fente » entre le châssis et l’asphalte et voit la merde tomber - vision traumatique qui lui rappelle à chaque fois avec angoisse ses accouchements qui lui ont paru dégoûtants. « Nascimur inter urinas et feces » écrit Saint Augustin qui place aussi la honte à notre origine. Pascale me rapporte un propos de sa mère : « Elle a fait une crotte », dit-elle pour parler de la naissance de ses enfants. Son père, lui, les appelait « ses petits merdeux ».

Penser la honte, c’est rester dans cette indétermination entre…

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8 articles
Honte et adolescence